PHÉNOMÈNE DE REMONTÉES D’EAUX PROFONDES DURANT LA PÉRIODE HIVERNALE 
AU LARGE DES CÔTES LIBANAISES (MÉDITERRANÉE ORIENTALE)
Marie Abboud-Abi Saab*, Milad Fakhri
Conseil National de la Recherche Scientifique, Centre National des Sciences Marines, B.P 543, Batroun Liban - *mabisaab@cnrs.edu.lb
Résumé
Des profils thermiques d’eaux côtières (0-100m) ont été réalisés mensuellement dans le bassin oriental de la Méditerranée (Batroun-Liban)
entre juin 1999 et octobre 2003. L’évolution annuelle de la structure hydrologique aboutit à un phénomène annuel de remontée d’eaux pro-
fondes entre janvier et février. Les valeurs annuelles élevées des nitrites dans toute la colonne d’eau durant cette période et la présence
d’espèces de profondeurs très variées sont en faveur de cette hypothèse. 
Mots clés: Côtes libanaises, Méditerranée orientale, séries hydrologiques, nutriments, remontées d’eaux.
Rapp. Comm. int. Mer Médit., 37,2004
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Introduction
Dans le but de détecter un effet de changement climatique possible
et extraire une tendance à long terme, des séries régulières sont deve-
nues fréquentes dans plusieurs régions de la Méditerranée (1, 2, 3).
Ces séries régulières ont permis de découvrir des phénomènes
annuels, des anomalies possibles et des variations interannuelles.
Ainsi depuis 1999 des séries verticales régulières ont été suivies dans
le but de connaitre l’évolution hydrologique des eaux côtières liba-
naises où peu d’informations sont disponibles. On admet (4) que le
bassin levantin est une région de convergence et de convection causée
par une salinité d’eau élevée spécialement en hiver; cette situation
tend à éloigner tout apport nutritionnel du plateau continental vers les
eaux du large; en est-il de même pour les eaux profondes?
Matériel et méthodes
Les mesures ont été prises mensuellement, entre juin 1999 et
octobre 2003 au point B2 (N 34°14.856; E 35 36.067), situé à 4 milles
de la côte. Les températures et les salinités ont été mesurées entre 0 et
100 m à 5 m d’intervalle lors de la descente d’une ligne instrumentée
avec un capteur ANDERAA pour la température associé à un capteur
de conductivité (Sensor Model 3230 : Salinité 0-40ppt; précision :
+
0.2 ppt. Température de -8 à 41°C; précision : +
0.1°C. Pression : 0-
11bar, 0.2% de la mesure). Des échantillons d’eau ont été collectés en
surface, 40m, 60m et parfois 20m pour l’analyse des nutriments et
des populations microplanctoniques.
Résultats et discussions
Sur le plan thermique trois situations différentes ont été bien
détaillées (5). Le refroidissement et les tempêtes hivernaux conduisent
à une homothermie verticale.La période février-mars marque la tem-
pérature minimale de 17°C sur toute la colonne d’eau. Cette période
d’homogénéité se prolonge jusqu’à la fin du mois d’avril. Cependant
à partir du mois de mars, un léger réchauffement superficiel commen-
ce, mais les vents violents du secteur perturbent considérablement
l’évolution temporelle de la température. Ces perturbations contri-
buent ainsi à l’entretien d’une instabilité hydrologique dans la zone. 
Le réchauffement superficiel n’arrive à s’installer qu’à partir de
début mai, la température atteint alors environ 20°C. A partir de cette
date, la température augmente rapidement et commence la formation
de la thermocline par une stratification thermique à partir des couches
superficielles. Elle gagne progressivement la profondeur jusqu’à 45-
50m. Il faut alors plus de 3 mois pour que le bas de la thermocline
atteigne ce niveau.Le réchauffement des eaux superficielles aboutit à
la formation d’un gradient vertical. L’évolution normale de l’hydrolo-
gie au large de la côte libanaise conduit à l’établissement d’une ther-
mocline séparant deux couches d’eau relativement chaude et d’eau
froide (situation de bicouche).
Durant la période estivale, le niveau supérieur de la thermocline
varie entre 30 et 50m. La thermocline est généralement limitée par
les isothermes 20 et 26°C. Cette situation est stable. La direction du
vent par rapport au rivage durant cette période d’une part, et la forte
stabilité des couches, due aux différences de température entre les
deux couches d’autre part, éloignent la possibilité d’un upwelling
côtier ou autre phénomène de mélange d’eau. La différence de T°C
entre la surface et le bas de la thermocline est aux environs de 10-
12°C. L’établissement sur les côtes libanaises d’une thermocline quasi
permanente séparant une couche d’eau chaude de 28-29°C et une
couche froide de 17°C pendant plus de la moitié de l’année a des
conséquences sur la structure thermique et biologique des eaux.
A partir de septembre, le refroidissement, associé à des hautes sali-
nités dans les couches superficielles, entraîne une stabilité faible ou
nulle. Les eaux froides superficielles ont tendance à gagner les
couches profondes suivant un mouvement de conviction, ce qui abou-
tit à une homogénéisation thermique dans les masses d’eau. Le refroi-
dissement est remarqué sur toute la colonne d’eau ce qui nous amène
à avoir une homothermie de température autour de 18°C. La thermo-
cline disparaissait toujours au cours du mois de novembre. Le refroi-
dissement continue tout en conservant l’homogénéité thermique
verticale de toute la masse d’eau qui aboutit à l’homothermie de 17°C
de température et ainsi l’homothermie hivernale est retrouvée et un
nouveau cycle thermique commence. 
La structure verticale de la salinité suit un certain cycle de façon
qu’en hiver, il y a une certaine homogénéité haline 39.24 ppm, puis
les couches superficielles entre la surface et 50-60m sont moins
salées que les couches sous jacentes : 39.19 contre 39.24. Avec la pro-
gression thermique, les salinités en surface atteignent 39.33 contre
39.15 vers 100m et en été les couches infrathermoclinales ont une
salinité inférieure à celles des couches suprathermoclinales de 0.3-0.5
ppm. Vers la fin de l’année, la situation s’inverse et la différence entre
les bouts de la colonne d’eau est 0.1ppm. Avec le refroidissement
automnal, les couches inférieures de la colonne 0-100m, légèrement
moins salées montent en surface car la stabilité thermique s’affaiblit
et il paraît que d’autres masses d’eau plus profondes montent vers les
surfaces. Cette idée peut être appuyer par les valeurs élevées des
nitrites sur les différents niveaux étudiés uniquement en janvier et par-
fois en février, de 0.01-0.013 contre 0.139-.16µatg/L selon les
années. Le refroidissement automnale qui provoque des mouvements
de conviction conduira à la remontée des espèces plus ou moins pro-
fondes vers la surface et aura comme conséquence une diversité spé-
cifique très élevé et un nombre d’espèces maximal dans différents
groupes microplanctoniques (6).
Références 
1-Chevaldonné P. & Lejeusne C., 2003. Regional warming-induced spe-
cies shift in north-west Mediterranean marine caves. Ecology Letters, 6:
371-379.
2-Romano, J.C., Bensoussan N., Younes W.A.N. & Arlhac D., 2000.
Anomalie thermique dans les eaux du golfe de Marseille durant l’été 1999.
Une explication partielle de la mortalité d’invertébrés fixés ? C. R. Acad.
Sc. Paris, Sc. Vie, 323: 415-427.
3-Salat J. and Pascual J., 2002. The oceanographic and meteorological
station at L’Estartit (NW Mediterranean), pp.31-34, CIESM Workshop
Seriesn°16: Tracking long-term hydrological change in Mediterranean
Sea, 134 p.
4-Wüst G; 1960. Die Tiefenzirkulation des Mitteländischen Meers in den
kernschichten des Zwischen-uns des Tiefenwassers. Deutsch. Hydrogra-
ph., z. 13:105-131.
5-Abboud-Abi Saab M., Romano J.-C., Bensoussan N. & Fakhri M.
(soumise). Suivis temporels comparés de la structure thermique d’eaux
côtières libanaises (Batroun) et françaises (Marseille) entre juin 1999 et
octobre 2002.
6-Abboud-Abi Saab, M., 2002. Annual cycle of the microzooplankton
communities in the waters surrounding the Palm Island Nature Reserve
(north Lebanon), with special attention to tintinnids. Mediterranean Mari-
ne Science, 3(2): 55-76.