CONTRIBUTION À L’ÉTUDE DE QUELQUES RÉCENTES MIGRATIONS D’ESPÈCES EXOTIQUES 
DANS LES EAUX TUNISIENNES 
Ben Souissi Jamila
1
*, Jeanne Zaouali
1
, Mohamed Rezig
2
, Mohamed Nejmeddine Bradai
3
Jean Pierre Quignard
4
et Bill Rudman
5
Institut National Agronomique de Tunisie, Tunis-Mahrajène. Tunisie - * bensouissi.jamila@inat.agrinet.tn
Laboratoire d’écologie littorale, Faculté des Sciences de Tunis, Campus Universitaire, Tunis, Tunisie
Institut National des Sciences et Technologies de la Mer, Sfax, Tunisie - Mednejmeddine.bradai@instm.rnrt.tn
Laboratoire d’Ichtyologie, Université de Montpellier II, France
The Australian Museum, Sydney, Australia - billr@seaslugforum.net
Résumé
L’étude de la biodiversité marine des côtes tunisiennes réalisée au cours de la période (1990-2003) nous a permis d’inventorier parmi la
faune récoltée les espèces exotiques Hemigrapsus sanguineus, Rhithropanopeus harrisii, Pilumnopeus vauquelini,Eucrate crenata,
Sphaeroma walkeri, Paradella dianae,Favorinus ghanensis, Chromodoris quadricolor,Fistularia commersoniiet Parexocoetus mento.Le
présent travail constitue une première mention des Crustacés Décapodes Hemigrapsus sanguineus et Rhithropanopeus harrisiiet des
Mollusques Nudibranches Favorinus ghanensiset Chromodoris quadricolor. 
Mots-clés: Migration lessepssienne, Espèces invasives, Première mention, Tunisie
Rapp. Comm. int. Mer Médit., 37,2004
312
Introduction 
En Méditerranée, le rythme de bioinvasion a connu une nette accélé-
ration au cours des dernières décennies, probablement en raison de l’in-
tensification du trafic maritime, des introductions accidentelles, des
transferts intentionnels et des eaux de ballast [1]. La Tunisie, vu sa posi-
tion géographique charnière entre les bassins occidental et oriental de la
Méditerranée est particulièrement concernée par ce phénomène de
bioinvasion. Ceci se concrétise par un nombre grandissant de décou-
vertes d’espèces exotiques, notamment d’origine lessepssienne. 
Méthodologie de travail
Les prospections ont été réalisées au cours de la période (1990-2003)
et ont particulièrement intéressé le golfe de Gabès, la lagune Sud de
Tunis et celle des Bibans ainsi que certaines enceintes portuaires (Radès
et la Skhira). 
Résultats et discussion
Les résultats des investigations ont montré l’apparition d’espèces
marines n’appartenant pas à la faune répertoriée jusqu’à ce jour en Tuni-
sie. Dans ce qui suit nous étudierons les quelques espèces invasives que
nous avons récoltées.
Hemigrapsus sanguineusest un crabe originaire de l’Océan Paci-
fique. Sa présence en Méditerranée est à la fois rare et récente puisqu’un
unique spécimen a été signalé pour la première fois en 2001 au nord de
l’Adriatique (Croatie)[2]. En Tunisie, nous avons récolté au printemps
2003, trois individus (2 femelles dont une ovigère et 1 mâle mesurant
entre 17 et 24 mm) dans la lagune sud de Tunis et le port de Radès. 
Rhithropanopeus harrisii: Cette espèce de crabe euryhalin est ori-
ginaire de l’océan Atlantique. Elle a été trouvée pour la première fois en
Méditerranée en 1994 en Italie (Delta du Pô)[2]. Depuis, de nombreuses
signalisations se sont succédées dans les milieux saumâtres notamment
dans la lagune de Marano (Italie) et l’étang de Berre (France)[2]. En
Tunisie, nous avons ramassé 2 individus femelles mesurant respective-
ment 7 et 12mm en septembre 2003 à l’entrée de la lagune sud de Tunis.
Pilumnopeus vauquelini: Ce crabe originaire du golfe Persique et
de mer Rouge n’a, jusqu’alors, été signalé que dans la seule Méditerra-
née orientale. Sa présence dans la lagune Sud de Tunis constitue donc,
après sa signalisation faite en 1924 en Egypte[2] sa seconde mention en
Méditerranée méridionale. Cette espèce exotique est essentiellement
représentée dans la lagune sud de Tunis par des individus femelles [3]. 
Eucratecrenata:Ce crabe originaire du golfe Persique et de mer
Rouge s’est introduit depuis 1927 en Méditerranée orientale, mais ce
n’est qu’en 1992 qu’il a été signalé par l’un d’entre nous en Tunisie.
Identifié sur l’ensemble du littoral du golfe de Gabès, depuis le début
des années 1990, il n’a pas été, à ce jour, signalé en Tunisie septentrio-
nale en dehors de sa récente apparition dans le lac Sud de Tunis [3]. 
Sphaeroma walkeri: Cet Isopode cosmopolite, originaire de l’océan
Pacifique est signalé depuis une trentaine d’années en Méditerranée
(Egypte). Il n’a pas été répertorié, jusqu’à ce jour, en d’autres points des
côtes méditerranéennes. Sa présence conjointement dans la lagune sud
de Tunis et le port de Radès constitue, en conséquence, sa première
signalisation non seulement en Tunisie mais aussi en Méditerranée occi-
dentale. Sphaeroma walkeri a vraisemblablement été véhiculé au milieu
des salissures biologiques des navires accostant dans le port de Radès et
son acclimatation dans les eaux tunisiennes est très récente [3].
Paradella dianae: A l’instar de l’Isopode originaire de Californie,
Paracerceis sculpta, mentionné par l’un d’entre nous pour la première
fois en Méditerranée en 1978, dans la lagune de Tunis, Paradelladia-
nae a été probablement introduit par le trafic maritime et semble s’être
bien acclimaté à tel point qu’il a concurrencé l’Isopode autochtone
Sphaeroma serratum[4]. 
Favorinus ghanensis: Depuis sa description pour la première fois
pour la Science en 1968[5], cette espèce n’a jamais été signalée en
dehors du Ghana. Nous avons ramassé massivement ce Nudibranche
caractéristique du fouling pendant les saisons hivernale et printanière
2003, dans la lagune sud de Tunis et le port de Radès parmi la Chloro-
phycée Ulva rigida. Le présent travail constitue non seulement une pre-
mière mention de l’espèce en Tunisie mais également en Méditerranée. 
De façon à peu près concomitante, mais avec une moindre fréquence
et abondance que l’espèce précédente, on note l’apparition dans la lagu-
ne des Bibans du Nudibranche exotique Chromodoris quadricolor.
Chromodoris quadricolor: Cette espèce a été signalée pour la pre-
mière fois en Méditerranée en 1982 près du cap Martola (Italie). Nous
avons récolté 2 spécimens de ce Nudibranche au mois de mai 2003 dans
la lagune de Bibans située au sud est de la Tunisie à la frontière avec la
Libye. Chromodoris quadricolora été ramassé à 5m de profondeur dans
une zone totalement recouverte par un herbier de posidonie où abondent
de nombreuses espèces de Porifères. La présente signalisation de l’espè-
ce en Méditerranée orientale rend l’hypothèse de migration lessepssien-
ne initialement écartée plus probable.
Fistularia commersoniiet Parexocoetus mento: Le nombre de
migrations lessepssiennes réussies d’espèces ichtyologiques en Tunisie
ne cesse de s’accroître. Les dernières en date sont celles de Parexocoe-
tus mentoet Fistularia commersoniipêchées respectivement en février
1999 dans l’archipel de Kerkennah et en septembre 2002 à Zarzis (sud
du golfe de Gabès). Depuis, 11 spécimens de F.commersoniiont été
récoltés entre les régions de Sfax et de Kélibia.
Conclusion
La faune marine tunisienne actuelle montre des modifications impor-
tantes qui se traduisent par l’établissement et l’acclimatation réussie
d’espèces exotiques dont le nombre a considérablement augmenté au
cours des dernières décennies. Les prospections que nous avons réalisés
ont permis, d’une part, de signaler pour la première fois la présence de
4 espèces exotiques et, d’autre part, d’apporter des éléments de réponses
quant à la migration et la propagation le long des côtes tunisiennes des
espèces invasives initialement cantonnées dans le golfe de Gabès.
Références
[1]-Zibrowius H., 1992. Ongoing modification of the Mediterranean
fauna and ?ora by the establishment of exotic species. Mésogée[Bulletin
du Muséum d’histoire naturelle de Marseille] 51: 83-107.
[2]-Galil B., Froglia C., Noël P., 2002. CIESM Atlas of exotic species in
the Mediterranean. Vol. 2. Crustaceans : decapods and stomatopods.
CIESM Publishers, Monaco, 192 p.
[3]-Ben Souissi J., Rezig M., Zaouali J., 2003. Appearance of invasive
species in the southern lake of Tunis. Proceedings of Sixth International
Conference on the Mediterranean Coastal Environment, Vol.2: 911-922.
[4]-Bey A., Rezig M., Ben Souissi J., Dridi M.S., 2001. Première men-
tion de Paradelladianae(Menzies, 1962) (Crustacé Isopode) dans le lac
sud de Tunis. Etude morphologique et écologique de l’espèce. Bull. Soc.
zool. Fr.,126(1-2): 220-223.
[5]-Edmunds M., 1968. Opisthobranchiate Mollusca from Ghana. Pro-
ceedings of the Malacological Society of London, 38: 83-100.