PARASITISME ET ANOMALIE DE CALCIFICATION DE LA COQUILLE OBSERVES CHEZ LA PALOURDE
EUROPEENNE RUDITAPES DECUSSATUS PRELEVEES DANS LA REGION DE SFAX (TUNISIE)
Trigui El-Menif N.
1*
, Gargouri Ben Abdallah L.
2
et Le Pennec M. 
3
1
Université de Carthage, Faculté des Sciences de Bizerte, Département de Biologie, Laboratoire d’hydrobiologie marine, Tunisie
2
Université du nord, Faculté des Sciences de Tunis, Département de Biologie, Laboratoire de Parasitologie, 
Campus Universitaire, Tunisie
3
Institut Universitaire Européen de la Mer, Université de Bretagne Occidentale, site Technopôle Brest IroisePlouzané, France 
Résumé
Des observations macroscopique et microscopique de palourdes Ruditapes decussatus(L) prélevées de janvier à décembre 2002 dans
quatre stations de la région de Sfax: Hagouna, Sidi Mansour, Port de pêche de Sfax et Gargour révèlent la présence d’une anomalie
coquillière affectant la partie postérieure des valves et d’un ensemble de parasitesau niveau des siphons, du manteau, de la gonade et de
la glande digestive (sporocystes et cercaires libres de Cercaria plumosa, de métacercaires de Gymnophallidae, de protozoaires; de
mixosporidies et microsporidies et de copépodes). Sur coupes semi-fines et ultra-fines, le manteau des individus affectés par la perturbation
coquillière montre deux parasites. Le premier, formé de cellules circulaires groupées dans des lacunes constituant des ensembles de
différentes formes. Le second, rare, proche du genre Stoecharthrum. C’est un parasite à paroi épaisse et à structure interne lamellaire, de
80 à 180 µm de longueur et de 40 à 80 µm de largeur.
Mots clés: Mollusque bivalve, Ruditapes decussatus, perturbation coquillière, parasitisme
Rapp. Comm. int. Mer Médit., 37,2004
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Introduction
La palourde Ruditapes decussatusest présente sur le littoral tuni-
sien à une densité atteignant 90 individus/m
2
(Gargour et Port de
Sfax). La production moyenne annuelle est de 1200 t dont 90% sont
exportés vers l’Europe.
Matériel et méthodes
Des prélèvements saisonniers de 100 à 150 palourdes ont été effec-
tués durant l’année 2002. Les stations étudiées se situent dans la
région de Sfax (Fig. 1): il s’agit de Hagouna, Sidi Mansour, du Port de
pêche et de Gargour. Une fois au laboratoire, les échantillons sont
examinés macroscopiquement et microscopiquement. Les individus
parasités et/ou présentant une anomalie coquillière sont dénombrés et
conservés pour analyse. Des portions du manteau sont fixées au glu-
taraldéhyde et à l’acide osmique et des coupes semi-fines et ultra-fines
sont réalisées pour des observations en microscopie photonique et
électronique à transmission. 
Résultats
Les perturbations affectant la coquille prennent naissance du côté
interne des valves, au niveau de la sortie des siphons, avant de s’exté-
rioriser. Elles entraînent progressivement des perforations, empêchant
la coquille de se fermer hermétiquement. Le taux moyen d’individus
affectés est élevé au Port (3,5 à 5,6%). A Sidi Mansour et Gargour le
taux varie de 2,3 à 3%, alors qu’à Hagouna, aucun cas n’est observé. 
Les observations microscopiques de la chair de palourdes prélevées
dans le Port révèlent la présence de parasites dans les gonades, les
siphons, le manteau et la glande digestive. Il s’agit de sporocystes et
cercairesde Cercaria plumosa, de métacercaires de Gymnophallidae
et de protozoaires (mixosporidies et microsporidies). Des copépodes
ont été observés, sans qu’il soit possible, pour l’instant, de les identi-
fier. Les taux de parasitisme enregistrés étant de 13.85% en été,
19,81% en automne, 12,94% en hiver et 11,75% au printemps.
Les observations des coupes semi-fines et ultra-fines du manteau
des palourdes affectées par des anomalies de calcification, révèlent
deux types de parasites. Le premier se présente sous la forme d’unités
cellulaires, de 12 à 18 µm de diamètre, à vacuole centrale volumineu-
se repoussant le cytoplasme et le noyau à la périphérie. Ces cellules
semblent se diviser par clivage formant une structure globale sans
forme particulièrement définie. Le deuxième parasite, de 80 à 180 µm
de longueur et de 40 à 80 µm de largeur, montre une paroi épaisse et
une structure interne lamellaire.
Discussion et conclusion
Les différentes observations des anomalies de calcification tou-
chant la coquille révèlent une similitude avec celles provoquées par la
bactérie, Vibrio tapetis, chez Ruditapes philippinarum(1). Les para-
sites affectant les tissus internes des palourdes sont nombreux et les
taux les plus élevés sont relevés chez les individus du Port. Ceci peut
vraisemblablement s’expliquer par l’enrichissement de ce milieu en
matières organiques provenant des rejets. Les hydrocarbures peuvent
avoir un impact car les résultats obtenus sur la teneur de ces compo-
sés totaux dans les tissus des bivalves se traduisent par des valeurs
plus élevées dans les stations du Port et de Gargour. 
Concernant certaines formes pathogènes présentes dans les tissus
de la palourde portugaise, (2) ont montré l’existence d’une parasitose
affectant le tissu conjonctif des branchies et des gonades et dont la
similitude est grande avec celle révélée dans notre étude. Pour ces
auteurs, le parasite serait proche de Perkinsus marinus dont la position
taxonomique est controversée. Selon (3) ce serait un Dino?agéllé.
L’autre parasite, rare chez les bivalves, semble proche du genre
Stoecharthrumrencontré chez Lucinoma borealis minor(4). C’est un
Mésozoaire dont le cycle évolutif comprend un stade asexué parasite:
le plasmode.
Ces résultats préliminaires montrent que divers agents pathogènes
peuvent affecter la palourde, à des taux variant de 10 à 20%. L’intérêt
économique de cette espèce en Tunisie nécessite une étude approfon-
die en vue d’identifier les pathogènes et déterminer leur impact sur
certains tissus.
Références
1-Paillard C., Percelay L., Le Pennec M. et Le Picard D., 1989. Origine
pathogène de «l’anneau brun» chez Tapes philippinarum(Mollusque,
bivalve). C. R. Acad. Sci. Paris, T. 309, S. III: 235-241.
2-Comps M. et Chagot D., 1987. Une parasitose nouvelle chez la
palourde Ruditapes decussatus(L.). C. R. Acad. Sci. Paris, T. 304, S. III:
41-44.
3-Murrell A., Kleeman S. R., Barker S. C; and Lester R. J. G., 2002.
Synonymy of Perkinsus olseniLester & Davis, 1981 and Perkinsus
atlanticusAzevedo, 1989 and an update on the phylogenetic position of
the genus Perkinsus. Bull. Eur. Ass. Fish. Pathol., 22: 258-265.
4-Monnat J. Y., 1970. Introduction à l’étude de la reproduction chez
Lucinoma borealis(Linné) (Bivalvia, Lucinacea), Thèse 3ème cycle,
Université de Bretagne Occidentale, Brest, 82 p.
Fig. 1. Carte de Tunisie indiquant les 4 stations de prélèvement des
palourdes.