L’ÉCOSYSTEME LAGUNAIRE DE SMIR (MAROC): HYDROLOGIE ET HYDRODYNAMIQUE
Abdellatif Chaouti
Université Mohammed V, Institut Scientifique, Rabat, Maroc - achaouti@hotmail.com
Résumé
Le régime hydrologique de la lagune de Smir est marqué par de grandes ?uctuations particulièrement de salinité et de température. Il est
la résultante de facteurs hydrodynamiques (marées et apports continentaux), auxquels s’adjoignent des facteurs, physique (évaporation),
topographique (profondeur) et physiologique (photosynthèse des algues, phanérogames et macrophytes).
Mots clés: Lagoon, Hydrology, Hydrodynamic
Rapp. Comm. int. Mer Médit., 37,2004
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Introduction
La lagune côtière de Smir est située au sud du détroit de Gibraltar
(N 35°43’et W5°20’) (1). Elle a subi un aménagement qui a contri-
bué à la modification de son hydrologie et son hydrodynamique, à la
disparition de certaines espèces de ?ore et de faune et à une réduction
considérable de sa superficie.
Matériel et méthodes
Des suivis journaliers ont été réalisés pour les eaux entrantes et sor-
tantes au niveau de deux stations fixes. L’une est située au goulet de
la lagune (N 35°43’151” et W 05°20’256”) et l’autre au niveau du
chenal des marais (N35°42’106” et W05°20’249”). La variation du
niveau de l’eau est suivie dans une station au milieu du port de plai-
sance.
Résultats et discussion
Au ?ot, les eaux marines euhalines pénètrent par le goulet et enva-
hissent la lagune en refoulant vers l’intérieur les eaux lagunaires
n’ayant pu s’écouler hors de la lagune pendant le jusant. Ces dernières
se mélangent, leurs salinités s’homogénéisent et atteignent des valeurs
voisines de celle de la mer (36.3PSU). Ces eaux (12°C en hiver et
16°C au printemps) venant de la mer s’étalent dans cette cuvette de
faible profondeur et se réchauffent sous l’action de l’ensoleillement et
du brassage avec les eaux chaudes descendues des marais. Le pH et
l’oxygène dissous montrent des évolutions parallèles avec la tempéra-
ture. Ils indiquent des valeurs caractéristiques des eaux marines et
varient de 7.9 à 8.3 et de 8.5 à 12.0 mg/l respectivement.
Au jusant, les eaux traversant le goulet sont plus salées et plus
chaudes que celles qui l’ont traversé au ?ot. L’oxygène et le pH sui-
vent la même tendance que la température. Ils affichent des maxima
respectivement de 8.8 et 12.9mg/l en automne avec des températures
maximales de l’ordre de 19.3°C et qui atteignent 26.1°C en été.
Pendant le re?ux, le chenal achemine des eaux oligohalines (salini-
té entre 3.7 et 4.5PSU et conductivité entre 6.9 et 8.0 ms/cm). Ces
eaux relativement chaudes ont une température moyenne de 20°C, de
faibles alcalinités (7.6<pH<7.8) et sont faiblement oxygénées
(3.7 à 6.5mg/l). Elles se mélangent avec les eaux poly-euhalines de
la lagune et constituent les eaux chaudes mésohalines. Ces eaux occu-
pent toute la zone du débouché du chenal et avancent dans la lagune
pour donner naissance aux eaux polyhalines dans les parties aval et
centrale. Les eaux marines euhalines parcourent toute la lagune, se
réchauffent et s’oxygènent par la photosynthèse. Elles repoussent les
eaux bloquées dans la partie amont de la lagune vers le haut du che-
nal. Une fois mélangées avec ces dernières, leur salinité augmente de
8.3 à 19.2PSU et leur température de 22.5 à 24.3°C.
Le pH et l’oxygène évoluent avec la température au niveau du che-
nal en accusant des amplitudes assez importantes et variant en fonc-
tion de la saison.
Pour les étales de basse mer, le retard enregistré dans la lagune
varie de 1h 45min (printemps) jusqu’à 3heures (automne) et de 45
minutes (hiver) à 1h 44min (printemps) pour la pleine mer par rap-
port aux horaires officiels. Pour se vidanger, la lagune met donc plus
de temps que lorsqu’elle se remplit, surtout pendant les marées de
vives eaux. Ce constat s’est concrétisé pendant le suivi journalier des
niveaux de marées (Fig. 1). Pour le chenal principal, le retard à marée
basse par rapport à celle donnée par l’annuaire des marées, atteint 6h
12min et il est de 3h à marée haute. Les étales de marées n’y durent
que 5 à 10 minutes alors qu’au niveau du chenal, elles sont très
rapides.
De même, les courants du ?ot et du jusant apparaissent à la suite
d’une étale brève (environ 10min). Les deux étales sont séparées de
4h 20min dans le port et de 7h 10min dans la lagune. Ceci déno-
te un décalage horaire à marée basse entre le port et la lagune qui est
en relation avec la différence de niveau et l’exiguïté du goulet. La
lagune se trouve, en effet, à un niveau plus élevé que celui du port.
L’eau, en revanche, pénètre par la forte poussée du ?ot marin avec une
remontée simultanée du niveau d’eau dans le port et la lagune. Ceci
minimise le retard et favorise une seule et même étale de pleine mer.
Par contre, au jusant, le volume d’eau appréciable entré par le ?ot
dans la lagune, n’arrive pas à être facilement évacuée par le goulet très
étroit. Ceci explique le retard à marée basse noté dans la lagune par
rapport à celui observée dans le port de plaisance. Cette dénivelée
engendre aussi une différence de marnage qui est inférieure à 0.5m
en automne 2000; il est de 0.37m au niveau du port et de 0.28m au
niveau de la lagune.
Références
1-Bayed A., et Chaouti A., 2001. Caractérisation physico-chimique des
eaux de la lagune de Smir en été. Rapp. Comm. int. Mer Médit., 36: 356.
Fig. 1. Variations de niveaux d’eau enregistrées au milieu du port de
plaisance de Kabila pendant une marée de vives eaux.
Les ßches doubles indiquent les heures de pleines mers (PMPC) et de
basses mers (BMPC) pour le port de Casablanca. Les ßches simples
indiquent ces mêmes horaires observés lors des mesures de niveaux d’eau
sur terrain. BMP: marée basse dans le port; BML: marée basse pour la
lagune; PM: pleine mer observée dans la lagune et le port.