Rapp. Comm. int. Mer Médit., 36,2001
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La mobilisation internationale en faveur de la gestion intégrée des
zones côtières, enjeu majeur pour les pays maritimes
Une fraction croissante de la population mondiale est concentrée dans
des régions côtières. L’espace littoral terrestre et marin subit donc de plus
en plus des nuisances résultant d’activités socio-économiques intensives
dans la bande côtière (notamment industrie, agriculture, transports, urba-
nisation et tourisme). Ce milieu constitue de ce fait une des zones de la pla-
nète où l’impact de l’homme sur l’environnement se fait sentir avec le plus
d’acuité. On comprend dès lors que la Conférence Mondiale des Nations
Unies sur l’Environnement et le Développement tenue à Rio de Janeiro en
1992 ait mis l’accent sur le besoin d’une protection accrue des zones
côtières (cf. chapitre 17 de l’Agenda 21). Celle-ci suppose que les Etats
maritimes mettent en œuvre des stratégies de gestion intégrée et durable de
l’éco-sociosystème littoral prenant en compte les interactions entre terre,
mer et activités humaines. Diverses organisations internationales se sont
préoccupées de cette question, en particulier l’OCDE (1), l’UNEP (2) et la
Commission Océanographique Interg 
vernementale de l’UNESCO-
COI, qui a favorisé l’édition d’ouvrages pertinents (3,4,5) et a lancé récem-
ment le programme ICAM (Integrated Coastal Area Management). En
Méditerranée, la Convention de Barcelone marque la volonté des Etats
riverains de protéger ce bien commun contre les pollutions. Complétant les
investigations déployées sous l’égide de la CIESM, les initiatives du Plan
d’Action pour la Méditerranée de l’UNEP visent à promouvoir des poli-
tiques de développement durable impliquant une réduction des émissions
polluantes, notamment au niveau des zones côtières (6). Fin 1999, la COI
a pour sa part organisé un séminaire de sensibilisation de chercheurs et
décideurs de 9 pays méditerranéens aux enjeux de la gestion intégrée de
l’espace littoral (7) ; par ailleurs, une conférence internationale sur ce sujet
s’est tenue peu après en Turquie (8). La COI a contribué aussi à la mise sur
pied, avec l’Université de Nice - Sophia Antipolis, du cours avancé inter-
national MICAM 2000 – Mediterranean Integrated Coastal A r 
e a
Management-, principalement soutenu par la Commission Européenne et
l’UNESCO, qui a rassemblé 51 participants de 20 pays et a fait ressortir
une attente des pays méditerranéens en matière de formation dans ce
domaine. 
Les besoins de recherche interdisciplinaire et de synergies entre
scientifiques et décideurs pour une gestion durable du littoral
L’élaboration de politiques de gestion intégrée du littoral doit s’appuyer
sur une connaissance approfondie des processus naturels et des perturba-
tions d’origine humaine affectant l’espace côtier, fortement soumis à des
interactions entre la mer et son environnement terrestre. Celui-ci alimente
le milieu marin en divers constituants provenant d’émissions naturelles et
anthropiques dans l’eau et dans l’air, introduits par les ?euves et par la
pluie ou par dépôt d’aérosols secs, après dispersion par les vents au dessus
de la mer. Il s’y ajoute des apports de polluants rejetés directement en mer,
comme par exemple ceux évacués par les eaux usées des émissaires
urbains côtiers ou les hydrocarbures résultant d’un trafic maritime peu res-
pectueux de l’environnement. Il y a donc là de multiples voies d’altération
du milieu marin et de ses écosystèmes. A l’inverse, le milieu littoral ter-
restre est exposé à des in?uences venues de la mer : tempêtes pouvant cau-
ser de graves dégâts sur les côtes, action mécanique des vagues contribuant
à l’érosion côtière, marées noires que les courants amènent sur les plages,
apport d’aérosols marins, ceux ci étant susceptibles de véhiculer des pol-
luants déversés en mer. De plus, la contamination par des rejets anthro-
piques de produits de la pêche et de l’aquaculture peut avoir des consé-
quences nocives sur la santé humaine, de même que la dégradation de la
qualité des eaux de baignade. On mesure donc l’importance des enjeux
socio-économiques d’une gestion véritablement intégrée des zones
côtières prenant en compte l’espace littoral tant terrestre que marin, ainsi
que l’interdépendance et les rétroactions entre ces milieux au fonctionne-
ment complexe. L’expertise des scientifiques est fondamentale pour définir
des stratégies de protection de l’environnement et fournir des éléments
d’aide à la décision de nature à privilégier le développement durable des
régions littorales. Cela suppose un engagement de leur part dans de nou-
velles formes de science-action au service de la société et une mobilisation
des compétences autour de projets fédérateurs interdisciplinaires associant
les sciences de l’univers, de la vie, de l’homme et de la société et de l’in-
génieur. Le renforcement des synergies entre scientifiques, pouvoirs
publics, acteurs du développement économique, élus et société civile est
d’autre part essentiel pour mettre en œuvre des pratiques avisées de ges-
tion intégrée des zones côtières.
Exemple de gestion intégrée des zones côtières adaptée aux spécifi-
cités de la façade méditerranéenne française
L’Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse et ses partenaires ont mis
au point une approche méthodologique novatrice en vue d’une gestion
intégrée du littoral de la façade méditerranéenne française. Elle prend en
considération les bassins versants adjacents, leurs apports et rejets (9) et
leur zone d’in?uence en mer, la qualité des eaux côtières et des enjeux éco-
nomiques majeurs tels que le tourisme, la conchyliculture et la pêche.
S’appuyant sur un découpage du littoral en unités de gestion englobant une
double bande à la fois terrestre et marine, les zones homogènes (Figure 1),
le Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) du
Bassin Rhône-Méditerranée-Corse résulte de la loi sur l’eau de 1992 (10).
Il reconnaît le littoral comme un milieu à haute valeur patrimoniale et vise
à préserver ou à restaurer ses éco-systèmes. La gestion intégrée des unités
spatiales homogènes définies précédemment repose sur des compétences
inter-communales et des acteurs locaux. Elle implique la compréhension
des phénomènes mis en jeu dans l’espace littoral, basée sur l’acquisition de
données dans des zones observatoires, en particulier dans des réserves
marines, l’évaluation de la qualité du milieu marin, l’étude du devenir des
polluants et la modélisation des courants. Ces informations sont utiles aux
décideurs en vue de l’ajustement de mesures de réduction des émissions
polluantes à terre. 
Références
1.- OECD (Organization for Economic Co-operation and Development), 1991, Report on CZM :
Integrated Policies and Draft Recommendation of the Council on Integrated Coastal Zone
Management.
2.- UNEP (United Nations Environment Programme), 1995, Guidelines for Integrated
Management of Coastal and Marine Areas with Special Reference to the Mediterranean Basin,
UNEP Regional Seas Reports and Studies N° 161. 
3.- IOC, 1997, “Methodological guide to integrated coastal zone management”, Manuals and
guides n°36, Intergovernmental Oceanographic Commission, UNESCO, Paris.
4.- B. CICIN-SAIN & R. W. KNECHT, 1998, “Integrated Coastal and Ocean Management-
Concepts and Practices, Ed. Island Press, Washington D.C.
5.- S. BELFIORE, 1999, “Education and training in integrated coastal area management : the
Mediterranean prospect”, Franco Angeli, Milano (Proceedings of an International Conference held
in Genoa, Italy, May 25-29, 1998).
6.- Le Plan d’Action pour la Méditerranée, 1996, Contribution au développement durable du
Bassin Méditerranéen, Secrétariat de la Convention de Barcelone, PAM / PNUE, Athènes.
7.- J. MORELLI, 2000, article de synthèse sur le Séminaire International de la COI/UNESCO
“De la recherche marine à l’aide à la décision en faveur de la gestion durable des zones côtières
en Méditerranée” organisé en partenariat avec la Région Provence - Alpes - Côte d’Azur
(Avignon, 20-21 Octobre 1999), Cahiers des XIèmes Rencontres Régionales de l’Environnement. 
8.- MEDCOAST, 1999, Land-Ocean Interactions : Managing Coastal Ecosystems, Proceedings of
the Joint Conference (Antalya, 9-13 November 1999, Turkey), E. OZHAN Editor.
9.- CIESM, 1995, Mediterranean tributary seas, CIESM Science Series 1, Monaco.
10.- Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux du Bassin Rhône-Méditerranée-
Corse, 1996, Comité de Bassin Rhône-Méditerranée-Corse.
LA GESTION INTEGREE DES ZONES COTIERES : UNE STRATEGIE AU SERVICE D’UN EQUILIBRE
DURABLE ENTRE TERRE, MER ET SOCIETE DANS LE BASSIN MEDITERRANEEN
Jacques Morelli 
1
*, Pierre Boissery
1
CNRS et COI/UNESCO, Paris, France
2
Agence de l’Eau Rhône-Méditerranée-Corse, Délégation de Marseille, Marseille, France
Résumé
Environ 60% de l’humanité vivant à moins de 60 kilomètres de la mer, le développement durable des régions côtières représente un des
grands défis du temps présent. Il suppose une gestion intégrée de l’espace littoral à la fois terrestre et marin, la connaissance des
interactions complexes entre ces milieux, l’étude des impacts des activités humaines actuelles ou projetées, et sur la base de synergies
renforcées entre scientifiques et décideurs, l’élaboration et la mise en oeuvre de politiques de protection de l’environnement côtier. Une
approche méthodologique novatrice adaptée aux spécificités de la façade méditerranéenne française est présentée.
Mots-clés : Protection de l’environnement littoral
Figure 1 : Les zones homogènes prises en compte pour la gestion inté-
grée de l’espace littoral de la façade méditerranéenne française (hors