Rapp. Comm. int. Mer Médit., 36,2001
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La palourde européenne R. decussata, est largement répartie au Maroc.
Ceci est probablement dû à des adaptations aux conditions des milieux. Le
but de ce travail est donc de mettre en évidence la variabilité des para-
mètres de structures ( recrutement, croissance, nombre des cohortes.)
induits par le milieu, et déduire à partir de ses résultats le ou les type (s) de
stratégies démographiques (r ou K) dans chacun des sites, et qui sont les
lagunes de Nador et Moulay Bousselham, et les estuaires de Sebou et Bou-
regreg (fig. 1).
M
atériel et méthodes
Les prélèvements de R decussata
ont été réalisés mensuellement et
pendant une année dans les quatre
sites, soit par draguage à Moulay
Bousselham, à l'aide d'une bêche
plate à Nador et au Bou-regreg ou
par plongée dans le Sebou. La surfa-
ce prélevée variée entre 3 et 8 mètres
de manière à avoir un échantillon
représentatif des différentes classes
de la population. Les abondances ont
été mesurées selon la longueur anté-
ro-postérieure (L), et regroupées en
classes l'amplitude 2 mm puis trai-
tées par l'analyse factorielle des cor-
respondances, ou A 
F.C méthode
essentiellement descriptive (1), et qui
consiste à étudier l'évolution des échantillons (distribution des tailles) en
fonction du temps. L'énumération des cohortes des populations, a été
déterminée par la méthode de Battacharya(2).
Résultats
La Figure 2, montre que le plan factoriel F1 x F2 (89,6% de l'inertie
totale), l'axe F1 (58,43%) est essentiellement expliqué par les point-sites
Moulay Bousselham et Bou-regreg (95% de contribution relative: C.R). Le
point-site Moulay Bousselham (C.R= 62%), situé du côté positif de l’axe
F1, est caractérisé par les point-tailles de 19 à 27 mm, La taille moyenne
de la population y est de 24,36 mm contre 21,49 mm pour l’ensemble des
sites. Le côté négatif de l'axe F1, est surtout expliqué par le point-site
(Bou-regreg; C.R = 31%), et où sont regroupées les point-tailles 5,7,9,11,
et 13 mm, la une taille moyenne y de 19,1 mm, et qui est inférieure à la
moyenne des l'ensemble des sites (21,49 mm). L'axe F 2 (31,17 % de
l'inertie totale) explique la différence de tailles qui existe surtout entre
le Sebou et Nador.
L'estuaire de Sebou, (C.R près de 80%), avec des tailles entre 35 à 61
mm, constituent plus de 20,5% de la population de ce site (556 ind) et prés
de 28% de cette catégorie de taille pour l'ensemble des quatre sites.  La
lagune de Nador où cette catégorie de taille ne constitue que 4,72% de la
population de ce site (3304 ind), alors que les tailles entre 1 à 17 mm
constituent presque 33% de la population de ce site et presque 53 % de
cette taille dans l'ensemble des sites, puisque la taille moyenne de la popu-
lation à Nador est de 20,45 mm, contre 23,56 mm au Sebou. Le nombre
des cohortes par la méthode de (2), est égale à 10 dans l'ensemble des
milieux paraliques, soit: 6 cohortes en milieu lagunaire et 8 ou 9 cohortes
en milieu estuarien (tab.1) L'amplitude du recrutement moyen (tailles infé-
rieures à 17 mm), est de 29,31 %, avec un maximum de 44,43% dans le
Bou-regreg, et un minimum de 6,95% à Moulay Bousselham, de 32,17 %
à Nador et 33,81% au Sebou.
Conclusion
De cette analyse, il ressort que R. decussataprésente des structures
démographiques propres à chacun des sites. La stratégie, en milieu lagu-
naire (Nador, Moulay Bousselham) est probablement de type r, c'est à dire
de courte durée de vie, une forte mortalité des jeunes classes d'âge suite
aux intempéries compensée par une forte fécondité, ce qui caractérise ces
milieux d'instabilité. Alors qu’en milieu estuarien (surtout le Sebou) la
stratégie serait de type K, soit une durée de vie plus longue, un taux de sur-
vie élevé des juvéniles, et donc des recrutements bien marquées malgré la
faible fécondité donc les contraintes environnementales plus ou moins
stables. Dans l'estuaire de Bou-regreg, les deux types coexisteraient, le
type r en médiollitoral, et le type k en infralittoral. Si les recrutements
sont plus importants à Bou-regreg et à Nador, ceci trouve son explica-
tion dans le facteur édaphique, qui est y hétérogène et grossier et
nécessaire à la fixation des larves (3). Les tailles importantes au
Sebou, s’expliquent par les conditions optimales de filtration particu-
lièrement la profondeur (8 mètres), et par le substrat surtout vaseux
favorable à l’élongation des coquilles.
Références
1 -Benzacri J. P, 1973- L'analyse des données. T II. L'analyse des correspon-
dances. Ed Dunod, Paris: 619p.
2 -Battacharya C.G; 1967- A Simple method of resolution of a distribution
into gaussian components.Biometrics, 23, (1): 115-135.
3 -Zine N.E; Menoui M; Zaouali J. 1997- Edaphisme et recrutement chez
Venerupis decussatadans la lagune de Nador (Maroc).Mar. Life Vol 7 (1-2):
17-27.
STRUCTURE ET LA STRATÉGIE DÉMOGRAPHIQUES DE LA PALOURDE (Ruditapes decussata) DANS DES
MILIEUX PARALIQUES ATLANTICO-MÉDITERRANÉENS DU MAROC
Nasser Eddine Zine
Faculté des Sciences, Beni M'hammed, Meknès, Maroc - nzine@hotmail.com
Résumé.
L'analyse de la structure démographique de quatre populations atlantico-méditerranéennes de Ruditapes decussata, a montré qu'il existerait
des variabilités de structure et de stratégie démographiques (types r, ou/et K) entre les sites étudiés, qui ne peuvent s'expliquer que par des
adaptations aux conditions du milieu. Ainsi en milieu lagunaire (Nador et Moulay Bousselham) les stratégies seraient de type r, alors quand
milieu estuarien surtout le Sebou elle serait plutôt de type k. Dans l'estuaire de Bou-regreg l'espèce semblerait avoir les types r et K, en
effet en médiolittoral (milieu instable), la stratégie serait de type r, alors que dans l'infralittoral c'est probablement le type k. L'analyse des
cohortes a montré que R. decussataprésente en moyenne dix cohortes, soit six en milieu lagunaire et huit en milieu estuarien, avec des
tailles maximales respectivement de 45 mm et 61 mm.
Mots clés: Estuaire, lagune, Ruditapes decussata, structure démographique, croissance, stratégie, Maroc
Figure 2: Distribution des point-sites et des structures démographiques
de Ruditapes decussatadans le plan factoriel F1 x F2.
(L: longueur antéro-postérieure en mm; F.R %: fréquence relative en pour-
centage; N: nombre d'individus; X: taille moyenne de la population en mm).
Tableau 1: Enumération des cohortes des populations de Ruditapes
decussatadans les sites étudiés.
Figure 1: Situation géographique
des sites étudiés.